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L’attachement de Varsovie à l’OTAN : Une solution à la « malédiction de la géographie » polonaise

Article écrit par Antoine R

Le 7 novembre 2019, l’interview d’Emmanuel Macron et les propos du président français sur la « mort cérébrale » de l’organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN) provoquent une onde de choc politique au sein des pays-membre de l’Alliance en Europe centrale. Parmi les réactions les plus virulentes figure la réponse du Premier ministre polonais Mateusz Morawiecki jugeant les propos du président français comme « dangereux ». [1] La Pologne apparaît parmi les États d’Europe centrale comme le pays le plus attaché à l’Alliance, conséquence d’une situation géographique particulière et d’une douloureuse histoire.

« La malédiction géographique » dans l’Histoire géopolitique de la Pologne

La géopolitique polonaise peut être résumée par la formule de « malédiction géographique » du journaliste et expert de la géopolitique polonaise, Jacek Bartosiak.[2] Situé au cœur de l’Europe centrale, le Royaume de Pologne connaît un statut de puissance régionale par son alliance avec le Grand-duché de Lituanie à partir de 1385, puis la république des Deux Nations par l’Union de Lublin en 1569. Toutefois, la Pologne est affaiblie au 16e siècle par les invasions suédoises, ottomanes ainsi que la guerre avec la Russie. Ceinturée par la Prusse naissante à l’Ouest, l’Empire russe à l’Est et l’Autriche au Sud, la République des Deux Nations ne parvient pas à empêcher les successives partitions de son territoire de 1772, 1793 et 1795 [carte n°1].

La partition du pays pendant 128 années favorise l’émergence du sentiment national et plusieurs insurrections écrasées dans le sang par l’occupant russe, en 1831, 1848, 1861 et 1905. La Pologne renaît toutefois à l’issue de la Première Guerre mondiale, par la défaite des Empires centraux et de l’Empire russe. Cette renaissance accouche de plusieurs guerres avec ses voisins, notamment contre l’Armée rouge dont l’avancée est stoppée à Varsovie le 15 août 1920 par les armées polonaises, aboutissant à la paix de Riga l’année suivante. À l’ouest, dans la région de la Silésie à majorité allemande, trois insurrections polonaises et des affrontements entre allemands et polonais se déroulent entre 1919 et 1921. L’enjeu du tracé des frontières occidentales avec l’Allemagne, et orientales, en Lituanie, en Biélorussie et en Ukraine représentent alors de multiples enjeux de conflictualité entre la Pologne et ses voisins germaniques et soviétiques.[3]

[Carte n°1] : Troisième partition de la Pologne de 1795. - Source : Lopez, J & MacLasha Y (2020, Août). Que la Pologne meure pour que la révolution vive, et inversement. Guerres & Histoire, N°56, 34-37.

[Carte n°2] : Les frontières polonaises issues du traité de Riga de 1921. - Source : Lopez, J & MacLasha Y (2020, Août). Le miracle sur la Vistule, juillet-août 1920. Guerres & Histoire, N°56, 44-49.

Frontalière de l’Allemagne et de l’Union Soviétique, la Pologne refuse toute alliance avec l’une des deux puissances, synonyme de vassalisation, et s’appuie sur une alliance militaire avec la France et le Royaume-Uni. Le 23 août 1939, le pacte germano-soviétique scelle le sort du pays, attaqué le 1er septembre par l’Allemagne et le 17 septembre par l’Union Soviétique. La Pologne capitule alors le 3 octobre. Selon l’historien Jean Lopez, cette capitulation de la Pologne n’est pas la conséquence de la guerre éclair nazie, mais de la situation géopolitique désespérée, ne pouvant tenir un front le long des frontières nord et ouest de 1000km avec l’Allemagne et la Slovaquie alliée du Reich, ainsi que 850km de frontières avec l’Union Soviétique [carte n°3]. Partagée par les deux puissances, un gouvernement polonais en exil poursuit le combat en territoire occupé et auprès des alliés.[4] La Pologne passe entièrement sous le contrôle de l’Allemagne à partir de juin 1941, puis de l’Union Soviétique en 1944. Malgré l’insurrection de Varsovie en août 1944, se traduisant par la destruction de sa capitale devant une armée rouge inactive, la Pologne devient prisonnière du processus de satellisation. Un gouvernement communiste soumis à Moscou est mis en place, tandis que les frontières de la Pologne sont également modifiées, par la perte des territoires orientaux aux profits des républiques socialistes d’Ukraine et de Biélorussie, en contrepartie de 200 km de territoires allemands à l’Ouest [carte n°4].[5]

[Carte n°3] - Source : Lopez, J. (2019). Campagne de Pologne, la Blitzkrieg, vraiment ?. La Wehrmacht, la fin d’un mythe. 61-69.

[Carte n°4] - Source : ‘La Pologne au lendemain de la Seconde Guerre mondiale’.2018. HistoCartehttp://histocarte.fr/2018/12/04/pologne-apres-seconde-guerre-mondiale/ 

Le gouvernement communiste polonais, dans un contexte de guerre froide, est alors contesté par  la société civile, comme le syndicat Solidarnosc créé en 1980, par les milieux étudiants ainsi que l’Église catholique. Le délitement du communisme aboutit aux accords de la table ronde du 5 avril 1989, entre le gouvernement et le mouvement Solidarność. Des élections semi-libres sont mises en place en 1990, remportées par le dirigeant de Solidarnosc, Lech Wałęsa, élu président de la République. C’est la fin de la République populaire de Pologne et la mise en place de la Troisième République de Pologne.[6]

 

Priorités stratégiques de la République de Pologne en 2020

L’étude de l’Histoire et de la géographie polonaise permet de comprendre la Pologne moderne, membre de l’OTAN depuis 1999 et de l’Union européenne depuis 2004, ainsi que sa vision géopolitique et stratégique. À l’Est, l’indépendance des républiques d’Ukraine, de Biélorussie et des 3 États baltes repousse territorialement et politiquement la Russie.

Le contentieux des frontières germano-polonaises de 1945 est réglé à l’occasion de l’accord « 4/2 » de septembre 1990 pour la réunification de l’Allemagne. Pour la première fois de son histoire, « la malédiction de la géographie » de la Pologne, s’escompte par la sécurisation de son voisinage à l’ouest par l’intégration de l’Allemagne dans l’OTAN et l’UE. Le renouveau de bonnes relations avec l’Allemagne est symbolisé par l’importance du commerce germano-polonais, notamment dans le domaine de la défense, atteignant 752 millions de dollars entre 1999 et 2019.[7] Toutefois, l’attitude de Berlin envers Moscou dans le domaine économique et énergétique demeure un enjeu de conflit, comme le projet « North Stream 2 » reliant directement la Russie à l’Allemagne par la mer Baltique, été décrié par la Pologne, ressuscitant le spectre traumatique du pacte germano-soviétique du 23 août 1939.[8]

La politique étrangère de la Pologne sur son flanc Est demeure toutefois plus conflictuelle, notamment avec la Fédération de Russie. Au sein de l’UE, la Pologne a démontré un grand activisme avec la Suède pour la création du partenariat oriental au sein de la politique européenne de voisinage (PEV) en 2009. La PEV a pour objectif de renforcer l’association politique et la coopération économique entre l’UE et six États de la région : l'Arménie, l'Azerbaïdjan, la Biélorussie, la Géorgie, la République de Moldavie et l'Ukraine [carte 5].[9]

Suite à l’intervention militaire de la Russie contre la Géorgie en 2008, puis la guerre en Ukraine en 2014, le spectre de la menace russe a été ressuscité, Varsovie craignant la modernisation des forces armées russes et l’utilisation de méthodes de « guerres hybrides » par Moscou contre les pays-membres de l’OTAN sur le flanc Est de l’Alliance. Ainsi, « la politique agressive de la Fédération de Russie » est citée comme la menace principale du document « Concept de défense de la République de Pologne » de 2016.[10] Diverses mesures de réformes et de modernisation des forces armées polonaises illustrent la priorité stratégique de Varsovie pour la protection de son territoire, telles que la création de la force de défense territoriale, la 5e branche des forces armées polonaises, formée pour la dissuasion d’une agression militaire conventionnelle ou hybride.[11] De plus, une hausse de l’effort de défense budgétaire a été consentie. Ainsi, le budget de défense atteignait 1,72% du PIB en 2013, puis 2,25% en 2015, avant de redescendre à 2% en 2019. Par ailleurs, cette hausse s’illustre notamment par la part consacrée aux acquisitions d’équipements, passant de 13,90% du budget en 2013 à 27,50% en 2018. [12] En effet, de vastes programmes de modernisations des armées ont été lancés, tel que le programme Wilk pour la rénovation et le renforcement de la flotte de chars de bataille de 752 véhicules. Varsovie prévoit ainsi l’acquisition de 800 chars de bataille de dernière génération pour 2040, soit la flotte de véhicules la plus importante au sein de l’UE.[13] De plus, le processus d’acquisition de pièces d’artillerie automoteur telles que 120 obusiers de 155mm Krab et de 104 lance-roquettes multiples M142 Himars traduit la priorité stratégique d’une défense nationale orientée contre une menace militaire conventionnelle.

Face à la Russie, l’ancien conseiller à la sécurité nationale du président de la République de Pologne et fondateur de la Fondation Casimir Pulaski, premier think-tank polonais sur la sécurité internationale, Zbigniew Pisarski, considère l’intégration euro-atlantique de l’Ukraine comme une priorité stratégique à l’occasion du Forum de la Sécurité de Varsovie en octobre 2018.[14] À l’été 2020, Varsovie s’est également révélée particulièrement active en soutien aux manifestations contre le président Alexander Lukashenko, considéré comme un allié de Moscou. De plus, la diplomatie polonaise s’est illustrée en Europe centrale par l’annonce du président polonais en faveur d’une alliance régionale centre-européenne en 2015, se traduisant l’année suivante par la mise en place de l’Initiative des trois mers lors du Sommet de Dubrovnik. Plus particulièrement, cette initiative regroupe 12 États (l’Autriche, la Bulgarie, la Croatie, l’Estonie, la Hongrie, la Lettonie, la Lituanie, la Pologne, la République Tchèque, la Roumanie, la Slovaquie et la Slovénie), ayant pour objectif de renforcer la coopération économique et les infrastructures entre la mer Adriatique, la mer Baltique et la mer Noire [carte 6].[15]

Ces différentes initiatives de la stratégie polonaise peuvent être perçues comme la renaissance du concept stratégique d’Intermarium, ou Międzymorze, hérité de la politique étrangère polonaise de l’entre-deux guerres, ayant pour objectif d’établir un glacis protecteur d’États alliés face à la Russie.

Carte 5 : États-membres de la PEV orientale - Source :‘Partenariat oriental’.  https://www.consilium.europa.eu/fr/policies/eastern-partnership/

Carte 6 : États-membres de l’Initiative des trois mers - Source : ‘The_three_seas_initiative_summit_en.Pdf’. https://ec.europa.eu/commission/sites/beta-political/files/the_three_seas_initiative_summit_en.pdf

 

La Pologne et l’OTAN : Une solution à la « malédiction de la géographie » polonaise

La Pologne a célébré le 20e anniversaire de son entrée dans l’OTAN en 2019, considéré comme le principal succès de la politique étrangère depuis 1990. « La malédiction de la géographie » de la Pologne, s’escompte alors par la sécurisation de son voisinage à l’ouest par l’intégration de l’Allemagne dans l’OTAN et l’UE, ainsi que la mise en place d’une Alliance stratégique majeure pour la sécurité du territoire polonais. L’attachement de la Pologne à l’Alliance et à la relation avec les États-Unis peut être souligné par la participation militaire de Varsovie à l’intervention militaire en Irak avec 200 militaires présents sur ce théâtre initialement en 2003. Cette participation a augmenté entre 2003 et 2008, atteignant un pic de 2 500 militaires polonais dans ce pays.[16] Par ailleurs, les exportations de défense américaines représentent 2 359 milliards de dollars de ventes vers la Pologne, soit le premier fournisseur étranger de matériels militaires pour Varsovie.[17]

L’attachement de Varsovie à l’OTAN et à la relation transatlantique peut s’expliquer par divers facteurs historiques, culturels, mais également stratégiques. En effet, les États-Unis dénombrent la plus importante minorité polonaise présente à l’étranger, avec une population de 9,15 millions d’individus en 2020.[18] Cette diaspora polonaise, ou polania, peut être soulignée par la figure de Zbigniew Brzezinski, fils de diplomate polonais en exil en 1939, naturalisé aux États-Unis et devenu conseiller à la sécurité nationale du président Jimmy Carter. L’auteur du Grand Échiquier : l’Amérique et le reste du monde en 1997 insiste particulièrement sur la démocratisation de l’Europe centrale ainsi que sur le lien profond entre les États-Unis et l’Europe, considérée comme la « tête de pont de la démocratie ». Cette « tête de pont de la démocratie » est également orientée vers l’Europe de l’Est, dont l’Ukraine, afin de stopper l’impérialisme russe.[19]

Par ailleurs, une étude approfondie des initiatives politiques et militaires de l’OTAN en Europe centrale permet de comprendre l’attachement de la Pologne au lien transatlantique. La mise en place d'un groupe de travail à très haut niveau de préparation (Very high readiness Joint Task Force, VJTF), a été décidée lors du sommet de Newport 2014, a prévu le déploiement de 600 hommes en 48/72 heures. En 2016, à l’occasion du sommet de Varsovie, quatre brigades multinationales rotatives ont été déployées dans les trois États baltes et en Pologne. Cette disposition a permis à l'Alliance de déployer environ 4 000 hommes dans la région en 2016, dont 1000 militaires américains.[20]

La posture des États-Unis pour la sécurité de la région est également soulignée par le projet initial d’exercice interarmes et interalliés Defender Europe 2020.[21] L’exercice devait ainsi mobiliser 20 000 militaires américains, dont 6 000 personnels et 9 000 véhicules déployés entre janvier et mars 2020, avant d’être réduit à 550 personnels et 55 véhicules blindés en raison de la pandémie de Covid-19. En août 2020, dans un contexte de tensions au sein de l’OTAN entre les États-Unis et l’Allemagne et de débats relatifs au déménagement des troupes américaines de l’Allemagne vers la Pologne, 1000 personnels militaires américains supplémentaires seront déployés en plus des 4 500 militaires déjà présents dans ce pays. Cette mesure est considérée comme la conséquence d’un activisme du président polonais Andrzej Duda en faveur du renforcement de la présence américaine en Pologne.[22] En comparaison, le Royaume-Uni dispose de 800 militaires prépositionné en Estonie tandis que l’Allemagne déploie 500 militaires en Lituanie. 200 militaires français, équipés de 4 chars de bataille Leclerc, 13 véhicules blindés de combat d’infanterie (VBCI), 4 véhicules de l’avant blindé (VAB) et 7 véhicules blindés légers (VBL) et soutenu par un échelon de soutien national (ESN) de 100 personnels sont également prépositionnés en Estonie dans le cadre de la mission Lynx.[23]


Conclusion

Traumatisée par son histoire, tiraillée entre les puissances allemandes et russes, l’attachement de la Pologne à l’OTAN et à la relation transatlantique s’explique par la neutralisation d’une menace allemande intégrée au sein de l’Alliance face au spectre persistant de la menace russe sur le flanc Est. Stratégiquement, les États-Unis offrent une garantie de sécurité non-négligeable, en comparaison avec la fragilité des garanties de sécurité de l’Allemagne, de la France et du Royaume-Uni. Le souvenir de l’Alliance entre Varsovie avec Londres et Paris durant l’entre-deux-guerres, n’ayant pas empêché l’invasion germano-soviétique de 1939, représente par ailleurs un souvenir traumatique chez les Polonais, préférant les garanties de sécurité américaine face à la menace russe. « La mort cérébrale de l’OTAN » apparaît ainsi comme inconcevable en Pologne.

 

 


Sources :

[1] ‘Pour le Premier ministre polonais, les propos de M. Macron sur l’Otan sont “dangereux”’. 2019. Zone Militaire

[2] Tymowski, M (2003). Une Histoire de la Pologne. La librairie polonaise. Les éditions noir sur blanc.

[3] Lopez, J & MacLasha Y (2020, Août). Le miracle sur la Vistule, juillet-août 1920. Guerres & Histoire, N°56, 44-49.

[4] Lopez, J. (2019). Campagne de Pologne, la Blitzkrieg, vraiment ?. La Wehrmacht, la fin d’un mythe. 61-69.

[5] ‘La Pologne au lendemain de la Seconde Guerre mondiale’. 2018. HistoCarte

[6] Tymowski, M (2003). Une Histoire de la Pologne. La librairie polonaise. Les éditions noir sur blanc.

[7] ‘Importer/Exporter TIV Tables’. http://armstrade.sipri.org/armstrade/page/values.php

[8] ‘Gazoduc Nord Stream 2: Peut-on Faire Confiance à l’Allemagne Pour Défendre Les Intérêts Européens ?

[9] ‘Partenariat oriental’. https://www.consilium.europa.eu/fr/policies/eastern-partnership/

[10] ‘Defense Concept - Publication - Ministry of National Defence - Gov.Pl Website’. Ministry of National Defence

[11] ‘Territorial Defence Forces - Ministry of National Defence - Gov.Pl Website’. Ministry of National Defence

[12] ‘20191129_pr-2019-123-En.Pdf’. https://www.nato.int/nato_static_fl2014/assets/pdf/pdf_2019_11/20191129_pr-2019-123-en.pdf ).

[13] ‘La France ouvre la porte à une participation de la Pologne au projet de char de combat du futur’. 2020. Zone Militaire.

[14] Pisarski: Na Agendzie Warsaw Security Forum Są Interesy Polski

[15] ‘The_three_seas_initiative_summit_en.Pdf’. 

[16] Poland marks end of mission in Iraq. (2010). Wayback machine

[17] ‘Importer/Exporter TIV Tables’. http://armstrade.sipri.org/armstrade/page/values.php

[18] ‘The Nation of Polonia | Polish/Russian | Immigration and Relocation in U.S. History | Classroom Materials at the Library of Congress | Library of Congress’. Library of Congress, Washington, D.C. 20540 USA

[19] Brzezinski, Z (2011). Le grand échiquier : L’Amérique et le reste du monde. Hachette pluriel référence.

 

[20] Langloit, Philippe. “L'OTAN après le sommet de Varsovie.” DSI hors-série N°49, August-September 2016, pp. 34-38.

[21] ‘Exercise Defender-Europe 20: Enablement and Resilience in Action’. 2020a. NATO Review

[22] Varsovie et Washington ont trouvé un accord sur une présence militaire américaine accrue en Pologne. 2020. Opex360

[23] ‘Mission Lynx’. Defense.gouv.fr