Fiers d’être Français : la bataille d’Austerlitz (1805)
LE CHEF D’ŒUVRE FRANÇAIS
Aucune bataille ne fut remportée avec tant de magnificence et de maîtrise que la bataille d’Austerlitz remportée par l’empereur des Français Napoléon Ier contre une coalition austro-russe érigée par l’Angleterre. C’est dans l’actuelle République tchèque, à 200 km au sud-est de Prague, que les Français vont dispenser une leçon d’art de la guerre aux Autrichiens et aux Russes coalisés. En infériorité numérique, à 73 000 Français contre 100 000 austro-russes, la France inflige une défaite décisive à ce qu’on appelait alors la Troisième Coalition. Aujourd’hui encore, les manœuvres de Napoléon sont enseignées dans les plus prestigieuses universités militaires du monde comme à West-Point ou Saint-Cyr.
LE POINT FINAL DE LA TROISIÈME COALITION
La Troisième Coalition européenne contre la France révolutionnaire et impériale se forme en 1805 alors que la République française devient un empire avec Napoléon Bonaparte à sa tête. Le Premier consul et futur empereur Napoléon a alors des visées sur le Royaume-Uni qui avait brisé la paix européenne d’Amiens, signée en 1802 entre Paris et Londres. Il prépare un débarquement pour contraindre l’Angleterre et assurer une paix durable en Europe. Mais l’alliance de l’Autriche, de la Russie et de la Suède à l’été 1805 l’empêche de continuer ses plans britanniques. Son armée, renommée « la Grande Armée », est redirigée vers le continent et en particulier Vienne.
Le but assumé de Napoléon : frapper Vienne avant que Saint-Pétersbourg ne fasse acheminer ses troupes. La Grande Armée traverse l’Allemagne à marche forcée ; à raison de 40 km par jour. Fin septembre 1805, les « Sept Torrents » (les sept corps d’armées qui composaient la Grande Armée et dirigés par d’illustres maréchaux comme Lannes, Ney ou Murat) franchissent le Rhin en direction de la Bavière envahie par l’Autriche.
Sur la route de Vienne, les 35 000 Autrichiens du général Mack sont écrasés près de la ville d’Ulm, du 15 au 20 octobre 1805. Mais les célébrations ne sont que de courtes durées : le lendemain, la bataille de Trafalgar prive les Français d’un plan d’invasion en Angleterre. Pour Napoléon, la situation s’aggrave : la Grande Armée se dilue à 1000 km de ses bases, la Prusse prépare son entrée en guerre et l’Angleterre a la suprématie navale. Pis encore, les Russes ont rejoint les Autrichiens.
La bataille finale se tiendra près de la ville autrichienne d’Austerlitz.
LE JEU DU CHAT ET DE LA SOURIS
Soufflant le chaud et le froid, Napoléon tourne son infériorité numérique à son avantage : il fait croire à une retraite et une déconfiture générale de la Grande Armée au fur et à mesure des escarmouches. En offrant le plateau de Pratzen aux Coalisés, qu’il avait reconnu une semaine auparavant, il conforte les Austro-Russes dans son piège. Si le général russe Koutousov se méfie de l’empereur, les jeunes généraux, désireux de prouver leur valeur, foncent dans le piège français. L’initiative est dans le camp de l’Empire napoléonien.
La bataille est livrée le 2 décembre 1805, date anniversaire du sacre de Napoléon Ier à Paris. La veille, les soldats font de grands feux de joie pour célébrer l’événement. Les Coalisés, voyant ce spectacle, pensent que les Français brûlent leurs campements en vue d’une retraite.
LE SOLEIL D’AUSTERLITZ
Pour la bataille, Napoléon aligne 73 000 hommes qu’il dispose de sorte que son flanc droit apparaisse affaibli. Les Russes et les Autrichiens déploient 100 000 soldats, principalement des Russes, sur le plateau de Pratzen. Les Coalisés se lancent à l’assaut du flanc droit des Français alors que la brume a envahi le champ de bataille. Les premiers combats s’engagent. Malgré une percée initiale, les Russes sont confrontés à une résistance française acharnée. Mais au lever du jour, alors que le soleil commence à percer le brouillard, les Russes stoppent leurs assauts : Napoléon a attaqué.
Le centre des Russes est enfoncé par le corps du maréchal Soult. Des canons sont installés au sommet du plateau de Pratzen, abandonné par la Coalition, et ciblent les forces ennemies en contre-bas. Les troupes russes sont massacrées alors qu’elles tentent de reprendre le plateau, harcelées par l’artillerie et la cavalerie françaises. La garde impériale du tsar de toutes les Russies est anéantie.
Dans un chaos généralisé, les troupes coalisées fuient le champ de bataille, désobéissant à leurs officiers. Ils empruntent les lacs gelés environnants et s’y noient lorsque l’artillerie française brise la glace. A 16h00, après neuf heures de combats, Napoléon est victorieux, n’accusant que 8 000 pertes alors que les Coalisés affichent 27 000 morts, blessés et prisonniers. Les 45 drapeaux capturés seront arborés dans la chapelle Saint-Louis des Invalides tandis que les 180 canons seront fondus pour ériger la colonne de la place Vendôme.
La Troisième Coalition est détruite, l’Autriche signant un armistice le 4 décembre 1805. La paix est conclue le 26 décembre à Presbourg. Le Saint-Empire romain germanique, vieux d’un millénaire, est anéanti, remplacé par une confédération d’Etats alliés de la France : la Confédération du Rhin. La Prusse, terrorisée, signe un traité de commerce avec la France qui annexe de nombreux territoires allemands. Quant aux Anglais, le Premier ministre William Pitt aurait dit à son valet de chambre, à l’annonce de la nouvelle de la défaite : « Roulez-la [ndr : la carte d’Europe accrochée à son mur], elle ne servira plus pendant les dix prochaines années. »
POSTÉRITÉ ET FIERTÉ
Austerlitz est resté dans les mémoires militaires françaises comme un triomphe. L’école militaire de Saint-Cyr, fondée par Napoléon, nommera chaque mois de l’année d’une des lettres qui compose le mot « Austerlitz ». En France, cette bataille mena à la construction de l’Arc de Triomphe afin de satisfaire au souhait de l’Empereur de voir y revenir les soldats de sa Grande Armée à l’instar des légions romaines antiques. La colonne Vendôme, inspirée de la colonne de l’empereur Trajan à Rome, sera érigée en 1810 en l’honneur de cette bataille. De même, un arc de triomphe, aujourd’hui situé au Louvre, célèbre la fulgurante victoire des armées françaises.
Considérée comme une victoire militaire majeure, elle siège, immortalisée par François Gérard, dans la Galerie des Batailles du château de Versailles, inauguré en 1837, en face d’une autre grande bataille : Bouvines, remportée par le roi Philippe-Auguste en 1214.
Victime de l’historiographie américaine qui considère la France comme une nation de perdants et de lâches, la bataille d’Austerlitz tombe en désuétude, oubli accentué par les mouvements associatifs victimaires qui voient en Napoléon le Grand un monstre négrier et guerrier.
Pourtant, Austerlitz est le génie français à son summum, preuve flamboyante que la France est une nation puissante et victorieuse, capable de coups d’éclats inattendus. Cette bataille consacre non seulement le génie napoléonien mais aussi la valeur de la Grande Armée et des soldats français, ceux qu’on appellera plus tard les « Grognards » et leurs descendants ; les « Poilus ».
Pour en savoir plus : La Petite Histoire de Christopher Lannes (2018) : https://vimeo.com/284898639