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L’écologie, un racisme anti-humains (1/2)

Gro Harlem Brundtland - NRK

Depuis 1987 et la publication par l’ONU du rapport Brundtland, l’opinion publique internationale sait qu’elle ne peut plus faire semblant d’ignorer ce qui se passe : la génération à venir devra adapter son mode de vie et réduire son empreinte sur la planète pour préserver celle des générations futures. Un véritable tournant, du moins pour la civilisation occidentale, déjà ébranlée quinze ans plus tôt par le choc pétrolier qui signait la fin des années faciles et du boom économique. L’avenir sera à la modération de la consommation, aux économies d’énergies et à la décarbonation de la production. De louables intentions pensait-on. Après tout, voir des déchets plastiques dans la nature ne fait plaisir à personne. Mais leurs enfants étaient-ils préparés à la remise en cause violente de l’existence même de leur espèce ?

Les écologistes actuels semblent avoir un problème avec l’espèce humaine. Par un savoureux mélange d’insinuations, de sous-entendus, de théories révélées et d’initiatives spontanées, ils instillent l’idée que l’espèce humaine n’a peut-être pas la légitimité pour occuper la place d’espèce dominante sur Terre, que l’ignoble servitude imposée à l’intégralité des autres individus vivants la disqualifierait moralement à exercer le magistère alimentaire suprême. Comme si la nature était une vaste démocratie, ou chaque famille animale représente une communauté forcée de négocier pour organiser la coexistence pacifique de chacun, un peuple ou une religion comme une autre. Et c’est cette démocratie que nous, mauvais et cupides humains, nous aurions dévoyé il y a 300 000 ans, par un coup d’état de notre ancêtre Homo Sapiens, qui aurait instauré un imperium tyrannique, ségrégationniste et génocidaire.

Les animaux contre les hommes

Les tenants de cette théorie utilisent d’abord comme outil le droit des animaux. Derrière le paravent du souci de la protection animale, il est facile d’incriminer l’humain comme le bourreau universel du vivant. Tout d’abord, il faut déconstruire l’idée du rapport à l’animal dans la tradition littéraire et philosophique occidentale. Oubliées les métamorphoses d’Ovide, ces animaux magiques (les cochons de Circée, les araignées d’Arachné ou le Taureau de Crète), symboles des interactions entre le monde des Homme et celui des Dieux. Oublié l’infâme Descartes, qui osait poser dans son discours de la Méthode la théorie des animaux-Machines, êtres mécaniques sans âmes, mus par les forces quantiques. Oublié Rabelais, qui attribuait le propre du rire véritable à l’Homme. Oubliés La Fontaine, Perrault, Saint-Saëns qui firent du genre animal le vecteur artistique des savoirs et des sagesses françaises. Même le serpent de la Bible doit être accusé de perpétuer la domination humaine. Tous sont battus en brèche par ceux qui refusent de hiérarchiser les espèces, et se sont lancés dans le combat pour une nouvelle abolition.

Il leur sera facile d’enfourcher la dynamique législative française en la matière. Les premières lois votées en France à ce sujet sont [1] la Loi Grammont de 1850 (qui punit d’amende la maltraitance publique d’animaux de compagnie dont les chevaux) puis le décret Michelet de 1959, qui étend l’infraction au domaine privé. La volonté du législateur n’était pas tant de protéger les animaux par souci d’humanité que de moraliser les comportements individuels dans les campagnes pour préserver une saine ruralité et de lutter contre les épidémies par la chasse aux animaux sauvages et le fichage de leur cousins domestiques. Raison pour laquelle l’animal reste dans le Code Civil considéré comme un bien meuble, soumis à la propriété de son maître (les animaux sauvages sans maître ne sont pas protégés). Une gageure pour les partisans de l’écologie émotionnelle qui batailleront dès les années 70 contre cette cruauté juridique, et n’hésitent pas à parler de discrimination, voire de ségrégation légale. Fondée en 1978, le Magazine 30 millions d’amis milite pour la reconnaissance de la sensibilité de l’animal. Cela sera fait par le Traité d’Amsterdam de 1997 qui posera ce principe au niveau européen, mais il faudra attendre la loi du 16 février 2015 pour que l’animal soit reconnu comme « être vivant doué de sensibilité » dans la loi. Une victoire dont les défenseurs de la cause ne se satisfont pas. Cette concession sera au contraire le marchepied de la guerre qu’ils ont déclaré aux activités humaines impliquant les animaux, toutes étant mises dans le sac de l’exploitation infamante et dégradante de nos amis à quatre pattes. On y trouve pêle-mêle des préoccupations légitimes (lutte contre le trafic illégal, pénalisation des abandons, dénonciation de la maltraitance), des combats déjà contestables (fin de l’euthanasie des animaux errants, de l’expérimentation animale, des vêtements de fourrure), voire des déclarations de guerre à des secteurs entiers de la vie sociale (limitation de la chasse, interdiction des cirques). Mais certains ne s’arrêtent pas en si bon chemin : fondée en 1977 par d’éminents scientifiques et journalistes, la Ligue Française du Droit des Animaux (devenue la Fondation Droit Animal en 2010) proclame en 1978 la « Déclaration Universelle des droits de l’Animal », qui dispense que [2] « la Vie est une, tous les êtres vivants ayant une origine commune et s’étant différenciés au cours de l’évolution des espèces » ou que la sensibilité nerveuse d’un vertébré lui confère un droit particulier à l’existence que des pratiques comme « la chasse et la pêche de loisir, ainsi que toute utilisation de l’animal sauvage à d’autres fins que vitales » le prive, enfin que « Le massacre des animaux sauvages, la pollution et la destruction des biotopes sont des génocides. ». Le cap moral est allègrement franchi, qui permet à ces gens de plaquer sur l’intégralité de la faune les plus hauts concepts du droit civil (ainsi la chasse devient un crime, un élevage devient une prison voire un camp, l’extinction d’espèce devient un génocide imprescriptible). Comme si après avoir fait abolir l’esclavage, décrété la fin de la servitude et renversé l’exploitation capitaliste, le prochain combat de la liberté serait celui des animaux. Comme si le peuple animal devait être la prochaine communauté à libérer de l’oppression de l’Homme (blanc évidemment). Un combat d’autant plus radical qu’il est repris par les nouveaux militants de « l’antispécisme », une idéologie mortifère qui entend s’opposer par la violence à la supériorité de l’Humain sur l’animal (les mêmes qui vandalisent des boucheries ou jettent en pâture les abattoirs sur les réseaux sociaux).

Ce grand délire n’aura de fin que lorsque les animaux seront mis sur le même piédestal que les humains, et seront reconnus comme êtres de conscience par une loi gravée dans le marbre. Alors les masques tombent, les intentions se révèlent enfin au grand jour, et l’entreprise de négation de la spécificité de l’Homo Sapiens sur l’œuvre millénaire de la Terre se précise : les animaux (comme les dauphins en Inde et des singes en Argentine [3]) se voient reconnaitre officiellement le statut de « personne non humaine ». C’est par cette reconnaissance juridique au forcing que nos amis les bêtes doivent se voir attribuer ce qui était auparavant réservé à l’individu : la capacité et la personnalité juridique, la protection par la loi de ses libertés individuelles. Bien que n’ayant pris part à aucun contrat social, l’animal doit être garanti dans les droits que la Nature lui a généreusement accordés, le tout avec la bénédiction de l’Homme, qui doit mettre la puissance de la technologie à son service, comme pour expier des millénaires de domination injuste. Plus besoin de défendre les migrants ou les peuples autochtones d’Amérique du Sud, le sort des chiens et chats maintenus en esclavage dans les foyers occidentaux est bien plus important.

Cette croisade des animaux contre les Hommes n’est pourtant que le premier artéfact de la profonde aversion de l’écologie politique contre l’Humain, comme on le verra par la suite.

Sources :

[1] – Les grandes lois de la protection animale, Fondation 30 millions d’amis
https://www.30millionsdamis.fr/conseils/legislation/les-grandes-lois-de-protection-animale/

[2] – Déclaration universelle des Droits de l’Animal, Fondation Droit Animal
https://www.fondation-droit-animal.org/la-fondation/declaration-universelle-droits-de-lanimal/

[3] – Attribution à des animaux du statut de « Personne non humaine »
https://www.lci.fr/societe/apres-les-dauphins-en-inde-un-singe-reconnu-comme-personne-non-humaine-en-argentine-1567045.html