Le domaine réservé : l’avantage stratégique de la France

 
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La France a-t-elle vraiment évolué sur les moyens de parvenir à ses différentes apogées durant sa longue Histoire ? De nos jours, certains camps politiques entendent remettre en cause les fondements de la Ve République, en prétextant une soi-disante obsolescence de la Constitution. Pourtant, jamais dans son Histoire, la France n’a été dotée d’une loi fondamentale qui joint à la fois l’efficacité d’un pouvoir exécutif fort et les exigences d’une démocratie moderne.

Les rois de jadis étaient sacrés en la cathédrale de Reims, oints par une huile sacrée sous les ors de l’Eglise. Aujourd’hui, ce n’est plus l’hérédité qui fait d’un homme (ou espérons-le, un jour d’une femme) le premier serviteur de la Nation, c’est le suffrage universel. D’abord établi par Louis-Napoléon Bonaparte, abolie par les régimes parlementaires des IIIe et IVe République, mais restaurée par Charles de Gaulle, l’élection du chef de l’Etat par le vote populaire est l’évènement le plus important de notre vie politique. Il est important de souligner que le président de la République est la seule personne élue par l’ensemble de la Nation. A l’inverse, nos députés, même si leur mandat est de représenter toute la Nation, ne se font élire que dans des circonscriptions qui découpent le territoire national.

Ayant ainsi une légitimité incontestée et incontestable, le président de la République joue un rôle qui ne se limite pas à « inaugurer les chrysanthèmes » mais bien à garantir l’indépendance de la France, la continuité de l’Etat. L’abdication de ces missions essentielles par des gouvernements issus de majorités parlementaires changeantes avaient mené l’Hexagone au bord du désastre avant qu’un Tigre ou qu’un Général ne reforge le glaive de la victoire…..

Dans l’esprit des rédacteurs de la Constitution, s’il est clair que les affaires intérieures sont importantes, rien n’est plus essentiel que la défense et la politique étrangère. Ces deux domaines ont toujours été traditionnellement réservés aux chefs de l’Etat. Louis XIV déclarait à ce sujet : « Mes ministres de la Guerre et des Affaires étrangères ne sont que mes commis. S’ils me déplaisent, je les change ! ». La pratique, beaucoup moins absolue aujourd’hui, consiste à ne pas contester les grands choix diplomatiques de l’Elysée au sein du gouvernement et de la majorité, peu importe leur(s) couleur(s) sauf en cas de démission. L’exemple de Jean-Pierre Chevènement illustre cette prédominance du chef de l’Etat.

Si nos présidents sont des monarques oints par le suffrage du peuple, ils ont besoin d’un spectre. Ce spectre prendra forme avec les armes nucléaires. Si le spectre royal symbolisait la puissance des rois très-chrétiens, les armes atomiques sanctuarisent le territoire national. Les saignées de 1870, 1914 et 1940 sont désormais impossibles étant donné le déluge de puissance qu’essuierait un envahisseur malavisé. Or, la décision de recourir à une telle arme ne peut émaner que d’une personne investie par la Nation seule comme chef des armées. D’ailleurs, l’article 16 de la Constitution autorise le président à user de tous les pouvoirs pour sauvegarder la France en cas de dangers graves.

Dans un monde où l’insécurité et les bouleversements se produisent de plus en plus sur la scène internationale, la France jouit ainsi d’un avantage stratégique : un centre de décision unique mais responsable devant les citoyens.

Certains voudraient supprimer cet avantage, à défaut de ne pouvoir l’assumer. Dans ce cas, on perdrait une prise de décision prompte et effective. C’est ce qui avait manqué au gouvernement Reynaud en juin 1940. D’autres suggèrent qu’il faudrait le partager avec des « alliés ». Mais ces « alliés » ne le sont que sur papier. On peut de bon droit penser qu’aucune décision ne serait prise étant donné les intérêts contradictoires de nos alliés de l’OTAN ou de l’Union européenne. S’il avait fallu attendre une réponse de Bruxelles, l’opération Serval n’aurait jamais été déclenché et les islamistes auraient pris Bamako en 2013. Enfin, d’autres encore estiment qu’en réalité la fonction présidentielle a perdu de son lustre à cause de ses titulaires. Imagine-t-on le général de Gaulle exhiber une Rolex ou bien s’aplatir devant une adolescente aussi orgueilleuse qu’illégale sur le sol français ?

Pourtant, les dérives auxquelles on assiste ne doivent pas nous faire oublier que le rôle du président est celui d’un arbitre. Il serait temps donc de revenir à la base de la Ve République et aux bases du domaine réservé.