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Le révisionnisme progressiste

Greta Thunberg, une des figure du révisionnisme progressiste moderne.

En 1990, l’Assemblée nationale votait une loi « tendant à réprimer tout acte raciste, antisémite, ou xénophobe » dite « Gayssot ». C’est la première des lois mémorielles françaises votées jusqu’en 2005. Condamnant de facto le révisionnisme et le négationnisme historiques, c’est-à-dire la révision de la « version officielle et consensuelle de l’Histoire » et la négation d’événements historiques, cet ensemble de textes législatifs vient frapper d’indignité toute pensée marginale, originale ou dubitative. En cela, c’est donc un corpus antiscientifique et antihistorique du fait que la science (dont l’Histoire est une discipline sociale) repose avant tout sur la capacité à remettre en cause les certitudes et les dogmes. Pourtant, si ces textes s’adressaient avant tout à contraindre et faire taire les contestations d’extrême-droite, c’est finalement le camp progressiste qui se complait et se compromet dans ces pratiques, souvent jusqu’au ridicule intellectuel. Avatar américanisé de l’individualisme cautionné par la morale victimaire, le progressisme « déconstruit », plus par intérêt idéologique que par volonté de rétablissement de la vérité historique. En quoi cette pratique est-elle dangereuse pour les sociétés ? Le discours développé est-il historiquement fondé ? Les arguments avancés ont-ils un sens ? Cet article se propose d’apporter les réponses à ces interrogations.

De l’Internationale à la mondialisation, les origines du progressisme

Le progressisme dans sa forme actuelle, à savoir une opposition au conservatisme social et économique héritée du communisme marxiste, apparaît en France avec la fin de la Guerre Froide. Le Parti communiste français – renforcé par son rôle résistant au cours de la Seconde Guerre mondiale – connaît au cours des années 1980 une chute brutale de popularité. Son alliance avec le Parti Socialiste sous l’égide de François Mitterrand lui sera fatale tandis que l’Union soviétique connaît ses dernières heures. La faillite du modèle communiste décrédibilise fortement le marxisme ainsi que l’idéologie de la « lutte des classes ».

Dans le même temps, la disparition de l’ennemi soviétique va créer un « grand vide » duquel jaillira de nouvelles préoccupations et menaces, du réchauffement climatique au terrorisme musulman. La manipulation du Front national par le pouvoir dirigeant achèvera de priver l’extrême-gauche de ses soutiens populaires traditionnels et ouvriers. Pour conserver un rôle politique, il faut donc s’adapter. Dans les territoires urbains, le communisme français renforce son internationalisme et son humanisme tiersmondiste d’un multiculturalisme fanatique inscrit dans la mondialisation nouvelle. Dans les banlieues autrefois ouvrières, il troque sa lutte des classes contre une « lutte des races », opposant les « victimes » issues de l’immigration et les « oppresseurs » autochtones. En dérivent ainsi le néo-féminisme et sa « lutte des sexes ». Le schéma « dominant/dominé » devient la colonne vertébrale de la pensée progressiste, seul et unique prisme intellectuel.

Enfin, une fraction des communistes se convertira à l’écologisme, masquant les idéologies marxistes sous un vernis « eco-friendly ». À noter la réutilisation du schéma précédemment défini entre la Terre « oppressée » et l’humanité « oppressante ».

Selon les progressistes, la Terre serait la première victime de l’oppression « systémique » humaine, majoritairement blanche, hétérosexuelle et masculine

Pourquoi déconstruire ?

Prenant exemple sur l’historiographie marxiste qui considère l’Histoire comme le récit de la lutte entre les classes sociales bourgeoise et ouvrière, l’historiographie progressiste voit en l’Histoire le récit des luttes entre dominants et dominés. Mais à l’inverse du communisme, le progressisme ne vise pas une quelconque révolution mais plutôt une anarchie individualiste.

Faisant le culte de la liberté individuelle, de l’ego, de l’égalité réelle et de la déresponsabilisation sociale, cette idéologie combat l’État, la nation et la société organisée qu’elle considère comme des contraintes insupportables à la jouissance personnelle. Pour atteindre ce but, elle use de la « déconstruction ».

Qu’est-ce que la déconstruction ? Littéralement, c’est une destruction (l’antonyme de « construire » étant « détruire ») des fondements mêmes des sociétés nationales établies au fur et à mesure de l’Histoire humaine. En offrant une vision simpliste des faits historiques (Bien/Mal, dominant/dominé, oppresseurs/oppressés), cette pratique vise à décrédibiliser les pratiques sociales mais aussi les lois elles-mêmes, pilier du « contrat social ». Sans lois, sans règles ni punitions, aucune société humaine n’est viable, ce qui conduit inévitablement à son effondrement et à un retour à l’État de nature originel, soit la guerre perpétuelle entre les hommes. En cela, la déconstruction progressiste est une menace grave envers toute société humaine constituée et doit être combattue avec acharnement.

L’écriture dite « inclusive » est un élément de « déconstruction » sociale visant à anéantir la langue française dans sa précision, sa fluidité et son efficacité

Quelle vérité historique dans les arguments progressistes ?

L’historiographie progressiste use de révisionnisme pour asseoir ses idées, magnifiant le rôle marginal d’une catégorie sociale, et dénonçant les actions du « groupe dominant » via des procès d’intentions idéologiques et anachroniques. Pour appuyer cette affirmation, il convient de critiquer trois exemples historiques mis en avant par le progressisme.

L’esclavagisme et le racisme sont le propre des Blancs

L’esclavage se caractérise par l’existence d’esclaves, c’est-à-dire des êtres humains non-libres, propriété matérielle d’autres êtres humains exerçant une emprise mentale et/ou physique. La première trace historique d’une société esclavagiste remonte au Néolithique – soit l’aube de l’humanité – entre 8500 et 3000 avant l’ère chrétienne (AEC). Il est plus connu de sources mésopotamiennes comme via le Code de Hammurabi, un texte législatif babylonien datant de 1750 AEC. Répandu au sein des sociétés du Moyen-Orient et d’Égypte, l’esclavage prend place des suites d’un défaut financier ou d’un butin de guerre.

Au sein des sociétés antiques, de l’Égypte pharaonique aux Romains en passant par les Grecs, Chinois et Mésopotamiens, l’esclavage ne revêt aucun caractère racial. Il est le plus souvent la conséquence d’un déshonneur militaire ou financier. Des « Blancs » sont esclaves de « Blancs » quand des « Noirs » sont esclaves de « Noirs ». C’est le cas par exemple de Vercingétorix, vaincu à Alésia et qui fut réduit au rang d’esclave comme ses soldats par les Romains de Jules César.

Chronologiquement, l’esclavage devient ensuite le propre des sociétés arabo-musulmanes ayant conquis le Moyen-Orient et l’Afrique à partir du VIIème siècle chrétien. La « traite arabe » sera d’ailleurs la plus importante des traites esclavagistes, concernant jusqu’à neuf millions de personnes dans le Sahara seul. Côté européen, le servage s’inscrit dans la féodalité et ne peut ainsi être considéré comme un esclavage à proprement parler du fait de la relation d’interdépendance entre le seigneur et ses serfs. Ce n’est qu’avec l’ouverture des premiers comptoirs africains et la demande de main d’œuvre dans le Nouveau-Monde qu’éclot un esclavagisme dit « triangulaire ». Cependant, il est à rappeler que les esclaves noirs sont vendus par de grands seigneurs locaux, parfois même issus de la même tribu ! Le commerce servile est lucratif pour toutes les parties.

Mais progressivement, les progrès techniques dans le domaine agricole vont mener à l’émancipation. Les premiers à abolir l’esclavage seront les Portugais en 1761. Ils seront rapidement suivis par les Français de la Convention nationale entre 1793 et 1794 pour des raisons philosophiques. Les Britanniques viendront à l’abolition en 1833 tandis que les Américains attendront 1865 et la fin de la guerre de Sécession. Depuis, l’esclavage persiste notamment en Afrique et au Moyen-Orient où les populations sont réduites à la soumission après des raids, des exactions ou des actes de piraterie comme en Somalie. Au sein des monarchies du Golfe, la privation de passeport revêt un aspect esclavagiste tandis que les mouvements islamiques n’hésitent pas à recourir à la servitude dans les territoires qu’ils conquièrent.

En conséquence, il est abusif, faux et trompeur d’accuser les seuls Caucasiens de racisme et d’esclavagisme. Revenir sur ce fait est du révisionnisme idéologique.

La traite arabe fut la plus massive et meurtrière des politiques esclavagistes, mais plus encore, elle démontre l’universalité du phénomène

L’Histoire humaine démontre l’existence d’un patriarcat misogyne

L’historiographie féministe-marxiste dépeint une « lutte des sexes » avec une domination historique de l’homme sur la femme. En conséquence, cette dernière devrait s’émanciper et combattre tout élément culturel concourant au fameux « patriarcat ». Qu’en est-il réellement ? Les sociétés et civilisations humaines sont organisées suivant un modèle patriarcal comme de nombreuses autres espèces animales sociables (chimpanzés, lions…). De fait, la culture développée reprend cette organisation naturelle et l’institutionnalise. Cependant, il serait présomptueux de penser que les femmes n’ont jamais eu aucun rôle politique, religieux ou économique.

Dans l’Antiquité égyptienne, les femmes jouaient un rôle social important, associées à la création divine et au Nil. Certaines, comme Néfertiti, furent même déifiées dans le cadre du culte d’Aton. Encore sous la domination grecque, l’Égypte acceptait d’être gouvernée par une femme en la personne de Cléopâtre VII. Au sein du monde hellénistique, majoritairement viril, certaines cités offraient des droits spéciaux et importants comme Sparte qui offrait une éducation physique et intellectuelle de qualité à ses jeunes filles. Celles-ci étaient écoutées et respectées à l’instar de la reine Gorgo, femme du roi Léonidas, ayant décrypté les communications perses au cours des guerres médiques. À Rome enfin, le sexe n’a aucune importance. C’est le rang social qui détermine le pouvoir dont dispose un individu. De fait, on dénombre de nombreuses femmes d’influence du temps de la République comme de l’Empire dans la fameuse figure de la matrone.

Après la chute de l’Empire romain, deux modèles se mettent en place. Le premier, d’inspiration germano-nordique, instaure un système égalitaire notamment en Europe. Le second, en place dans les mondes musulmans et asiatiques, tend à reléguer la femme à un rôle plus qu’anecdotique. Au Moyen-Âge européen, les femmes du peuple sont l’égal des hommes, participant aux assemblées locales et à la vie économique du pays. Au sein de l’élite, cependant et du fait des questions maritales monarchiques, ces dernières voient leur influence diminuer jusqu’à l’époque moderne où elles règneront culturellement comme sous Louis XV et Louis XVI avec l’influence des grandes femmes de cour, de la Pompadour à Marie-Antoinette.

En réaction à cette déliquescence du pouvoir, la Révolution française va instaurer un code civil défavorable aux femmes accusées de sentimentalisme. Dans les faits, cette ségrégation ne s’applique qu’aux milieux aisés où la femme peut se permettre de ne pas travailler et dépend entièrement de son mari. Au sein des milieux populaires, l’égalité prime à l’exception du droit de vote, attribut du citoyen. Dans le monde anglo-saxon cependant, les femmes vont assister à une violente soumission puritaine (époque victorienne) d’où naîtra l’actuel féminisme.

En 2020, l’égalité en droit des hommes et des femmes est atteinte avec seulement 3% d’écart salarial inexpliqué (bien que le congé maternité et les cotisations associées doivent jouer un rôle important) dans les pays occidentaux développés. En revanche, au sein des sociétés fortement religieuses, les femmes demeurent victimes d’une violente domination allant jusqu’à la mise à mort.

L’Angélus (1859) de Jean-François Millet démontre la réalité du monde paysan : une égalité de traitement des hommes et des femmes dans le travail et la pauvreté au sein des sociétés occidentales

Les homosexuels ont toujours été persécutés pour leur orientation sexuelle

L’historiographie homosexuelle – relayée par le lobby LGBT – tend à dénoncer l’histoire comme une longue succession de persécutions envers les pédérastes. Qu’en est-il réellement ? Sous l’Antiquité, l’homosexualité, ou plus exactement la bisexualité, est tolérée et acceptée à partir du moment où l’homme et la femme accomplissent leur devoir citoyen de reproduction. Ainsi, en Grèce antique, vantée pour son homosexualité débridée, les hommes refusant de prendre épouse dans un but reproducteur étaient marginalisés, persécutés et ostracisés, exilés de la Cité car indignes de la citoyenneté et du devoir associé de perpétuation de la nation. À Rome, la même politique est adoptée, passant par une condamnation politique et fiscale des célibataires, encore en vigueur de nos jours. En revanche, les maisons closes disposaient de prostitués des deux sexes et il ne faisait aucune honte à coucher avec un homme quand on en était soit même un.

Un élément crucial dans cette représentation biaisée de l’Histoire est l’apparition du christianisme et de l’islam qui vont condamner fermement toute sexualité autre que reproductive. Malgré les interdits sociaux, il était courant de voir se perpétuer ces pratiques comme sous Louis XIV, tolérant son frère Philippe, homosexuel notoire. En Asie, les samouraïs se livraient également à ces pratiques. Un élément était cependant incontournable, la nécessité de se marier à une femme et celle d’être un homme vertueux (courage, maîtrise de la guerre, raison, etc.).

En conséquence, l’Europe n’a jamais été « homophobe ». La pratique sexuelle était tolérée à condition de prendre épouse et de se comporter comme un homme vertueux. Encore aujourd’hui, ce n’est pas la pratique qui est condamnée, mais le renversement culturel qui tend à détruire la figure masculine traditionnelle, autrefois exemple pour les hommes, peu importe leur orientation sexuelle. Cependant, il existe encore, dans les pays religieux, de nombreuses persécutions comme en Iran ou dans les monarchies du Golfe.

Bisexuels, les Grecs toléraient l’homosexualité à condition qu’elle ne soit pas stérile pour la communauté et que l’homme s’inscrive dans la vertu (Léonidas aux Thermopyles, Jacques-Louis David (1814))

Conclusion

Pour résumer, les idéologies progressistes – féminisme, antiracisme, « homosexualisme », individualisme ou encore écologismes – usent de révisionnisme historique. Elles détournent et retravaillent la vérité historique dans un but politique et culturel, celui de la destruction (cyniquement appelée « déconstruction ») des civilisations dans le cadre d’un anarchisme individualiste malsain. Niant la complexité des faits passés, préférant une version binaire de l’Histoire, le progressisme représente une menace capitale pour le camp conservateur et pragmatique. Pour autant, la réponse consiste-t-elle dans les mouvements naissants virilistes et machistes, ou passe-t-elle par une rééducation culturelle et historique des masses ? N’est-il pas plus efficace de contredire les arguments non-valables plutôt que d’offrir un flanc royal aux critiques ?

Sources :

Le génocide voilé : enquête historique, Tidiane N’Diaye (2008)

Le Suicide français, Éric Zemmour (2014)

https://www.marianne.net/monde/greve-climat-greta-thunberg-discours-marketing

http://www.academie-francaise.fr/actualites/declaration-de-lacademie-francaise-sur-lecriture-dite-inclusive