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Trafic d'animaux : la vérité qui dérange

Le meilleur ami de l’Homme est victime de son succès et est devenu pour certains un article de recel…. - Pixabay / Timur85

Le trafic d’animaux n’est pas à prendre à la légère : en effet, il se trouve à la troisième place des trafics illégaux dans le monde, derrière le trafic d’armes et de drogues. En France, la dépense annuelle destinée aux animaux atteint les 4,2 milliards d’euros : avec 60 millions d’animaux sur son territoire soit presque autant que ses habitants. C’est une vraie mine d’or pour les trafiquants, et les chiffres ne trompent pas : ce trafic d’animaux atteint 160 milliards d’euros dans le monde, et 10% de ce chiffre correspond au trafic d’animaux domestiques. 

Le problème est complexe : en moyenne, les Français achètent environ 600 000 nouveaux chiots par an. Les éleveurs français ne peuvent pas répondre à cette immense demande. C’est donc le schéma parfait pour les trafiquants. Les français impatients et désireux d’un nouveau compagnon ont deux alternatives : les animaleries et les « faux » éleveurs, c’est-à-dire, le plus souvent, les petites annonces sur les sites Internet, le principal hébergeur d’annonces illicites étant Leboncoin. Le Net a grandement facilité ce commerce illégal : les annonces sont si dispersées (à travers les sites) et si nombreuses qu’il devient extrêmement difficile de les repérer et surtout de les condamner. De plus, les chiens « à la mode » contribuent également à l’expansion du trafic : malgré leur sensibilité pour la cause animale, la plupart des Français continuent à acheter des animaux, malgré le fait qu’environ 100 000 d’entre eux soient abandonnés en France chaque année. Et la mode est inquiétante, par exemple le nombre de carlins, tout petits chiens à la gueule écrasée, a été multiplié par quatre en dix ans (10 408 en 2016). Ils ont la cote sur les réseaux sociaux : « Dougt the pug » compte 3,8 millions d’abonnés sur Instagram. De même, les spitz nains peuvent se revendre à plus de 3000 euros ! Quand la demande est trop forte, les trafiquants en profitent : ce sont les petits chiens qui se revendent le mieux. La plupart des importations viennent d’Europe de l’Est (notamment en République Tchèque, en Hongrie et en Slovaquie). Le processus est parfaitement rôdé et le réseau organisé : d’Europe de l’Est, les animaux passent très souvent par la Belgique qui est une plaque tournante des trafics en Europe. La législation belge est plus laxiste, autorisant l’entrée d’animaux sur leur territoire à partir de sept semaines. Par comparaison, un chien doit être âgé de plus de trois mois et vingt-et-un jours avant de pouvoir entrer sur le territoire français. C’est très souvent en Belgique que les documents des animaux sont falsifiés par des vétérinaires complices (souvent en mentant sur l’âge de l’animal) pour permettre leur entrée en France. Les animaux ont donc fait, à seulement quelques semaines ou quelques mois, des milliers de kilomètres, entassés dans des camionnettes. Même avant de prendre la route, ceux-ci étaient enfermés dans des enclos minuscules, sans contrôle sanitaire, souvent maltraités. La plupart partent de leur pays natif non sevrés, puisqu’arrachés de leur mère à seulement sept ou huit semaines (au lieu des trois mois requis pour les chiots). Cet état de fait n’est pas sans conséquence : les acheteurs français risquent fort de se retrouver avec des animaux touchés par des troubles du comportement et des maladies comme la pavovirose, la maladie de Carré ou encore la toux du Chenil. Sur 20 millions de chats et chiens de France, 100 000 par an entreraient sur le territoire illégalement : 20 % placés dans des animaleries peu scrupuleuses et 80% revendus par des particuliers. Et le marché est lucratif… Un chien acheté 250 euros en Slovénie peut être revendu jusqu’à 950 euros en France.  

Quelles sont les solutions ? Un véritable progrès éthique est survenu le 28 janvier 2015 : l’animal a enfin été reconnu par le Code Civil comme un « être vivant doué de sensibilité ». Une véritable avancée venait d’être construite. En outre, d’un point de vue pratique, le Code Rural a permis plus de transparence chez les revendeurs d’animaux depuis le 1er janvier 2016, dans une nouvelle réglementation imposant « à toute personne qui veut produire et vendre un chiot ou un chaton, de se déclarer préalablement auprès de la chambre d’agriculture et d’obtenir un numéro SIREN. » Jusqu’en 2016, les particuliers pouvaient vendre jusqu’à une portée par an sans aucune règle. Cette nouvelle réglementation l’empêche, et oblige les éleveurs à s’identifier de manière légale. En cas d’absence de ce fameux numéro, le revendeur d’animaux encourt jusqu’à 7500 euros d’amende. Toutefois, une parade est utilisée par la plupart des revendeurs déshonnêtes, en plaçant leur annonce, notamment sur Leboncoin, en tant que « Don », et donnant ultérieurement aux acheteurs intéressés le coût de l’animal. Le problème du trafic d’animaux est absolument complexe et sa résolution semble pour l’instant compromise : chercher les trafiquants parmi les revendeurs particuliers reviendrait, pardonnez l’expression, à chercher une aiguille dans une botte de foin…