Histoire de France (3/4)

 
Prise de la Bastille, 14 Juillet 1789. Artiste anonyme français, Musée de la Révolution Française

Prise de la Bastille, 14 Juillet 1789. Artiste anonyme français, Musée de la Révolution Française

 

Qu’est-ce que la France ? Un territoire, un peuple, une culture, tout cela à la fois ? Notre pays a une Histoire richissime doublée de faits militaires glorieux et de pensées éternellement inscrites dans le code génétique de l’humanité. Questionner et analyser son épopée, c’est se questionner en tant qu’individu membre d’une grande famille nationale, unique en son genre : le peuple français. Parce que nous sommes les héritiers d’un territoire, d’un peuple, d’une culture et d’une histoire en commun, nous, Français, sommes à la fois ducs, serfs, chevaliers croisés, mousquetaires, hussards de l’Empereur, et Poilus des tranchées. Ainsi que le disait l’illustre artisan de la Victoire, le maréchal de France Ferdinand Foch : « un homme sans mémoire est un homme sans vie, un peuple sans mémoire est un peuple sans avenir ». C’est pourquoi il convient de revenir sur notre mémoire à tous.

La Révolution française

Le dernier quart du XVIIIème siècle est un tournant capital dans l’Histoire de France. La royauté, humiliée par l’échec de la guerre de Sept-Ans qui voit triompher Berlin et Londres, accuse la perte de son empire colonial en Amérique du Nord ainsi que d’énormes dettes. Louis XVI profite des troubles coloniaux du Royaume-Uni pour venger cet affront. L’intervention française en faveur des futurs États-Unis doit permettre le retour de Versailles sur le devant de la scène internationale. Contre toute attente, la puissante marine britannique est vaincue par les navires de Sa Majesté. À Yorktown (1781), le corps expéditionnaire offre une victoire sans conteste aux insurgés américains. La France a remporté son pari mais les dettes du pays n’ont fait qu’augmenter. C’est bientôt la crise économique et avec elle, la crise politique.

Renforcée par les « Lumières » (Voltaire, Rousseau, D’Alembert, Montesquieu…), la contestation bourgeoise et nobiliaire envers le pouvoir royal centralisé prend forme. Sans surprise, ces derniers désirent l’établissement d’une monarchie parlementaire et constitutionnelle calquée sur le modèle anglais. La crise économique et la famine mènent le Roi à convoquer les États-Généraux (assemblée nationale avant l’heure) dans le but de faire voter les réformes fiscales et économiques adéquates. Mais rapidement, ceux-ci, sous l’impulsion du Tiers-État bourgeois, du bas-clergé et de la petite noblesse, s’opposent frontalement au Gouvernement.

Fragilisé, ébranlé et se sentant menacé, Louis XVI enchaîne les fautes politiques et les maladresses. En rassemblant ses régiments autour de Versailles, il provoque la panique parisienne et la prise de la Bastille. En désirant reprendre son pouvoir en main, il trahit en déclarant une guerre perdue d’avance contre sa belle-famille autrichienne et la Prusse. Dans la même optique, il tente, sans succès, de fuir le pays. Bientôt, l’idée d’une France sans royauté s’installe et se développe. Après un dernier soulèvement populaire contre le palais royal des Tuileries, le monarque est emprisonné et déchu de ses fonctions. C’est l’avènement de la République !

Très tôt, la France républicaine est confrontée à une double guerre : contre les Européens aux frontières et face aux royalistes en son sein. Pour faire face, le nouveau régime instaure la « Terreur » et proclame des mesures d’exception. Dominée par la petite bourgeoisie parisienne, la République développe un culte de l’Égalité et de la Raison, incarnée par les fameux « Jacobins » aux rangs desquels Marat, Danton, Robespierre et Desmoulins.

Après presque deux années de sacrifice et de guerre civile, la France triomphe. À Fleurus (1794), elle achève la conquête des Pays-Bas autrichiens tant désirés par les rois de naguère. Il est temps d’en finir avec la Terreur. Robespierre tombe et le Directoire voit le jour. Régime instable et incapable de se maintenir sans coups d’État permanents, il se distingue pour avoir été le tremplin d’un homme : le général Napoléon Bonaparte.

Ce dernier, vainqueur des Autrichiens en Italie et des Arabes en Égypte, profite de sa renommée pour « franchir le Rubicon » et s’emparer du pouvoir politique. Le Consulat est fondé et la Révolution s’achève. Celle-ci est la pierre angulaire de la France contemporaine. Prisme de réflexion intellectuel par excellence, elle va conditionner toute l’histoire politique française pendant deux siècles. Cependant, il convient d’insister sur le caractère finalement traditionnel de la Révolution, en effet, celle-ci, dans sa politique extérieure et son affirmation de l’État central, parachève le rêve des rois de France depuis la fondation de la dynastie capétienne. Ironiquement, le régime régicide de la Convention nationale qui mit fin aux jours de Louis Capet, est aussi celui qui en appliqua le mieux la doctrine familiale.

 
Bataille de Fleurus (1794), triomphe de la Révolution en Europe

Bataille de Fleurus (1794), triomphe de la Révolution en Europe

 

L’épopée napoléonienne

Alors que commence le XIXème siècle, la France est dirigée par Napoléon Bonaparte. Son Consulat est un régime républicain fort et autoritaire s’appuyant sur trois axes fondateurs : Ordre, Égalité et Mérite. Bourreau de travail, le Premier consul accouche d’un ensemble d’œuvres institutionnelles toujours en vigueur de nos jours : Banque de France, École polytechnique, Baccalauréat, Légion d’Honneur, Code civil, etc.

Sur le plan extérieur, la France est toujours en guerre contre l’Europe monarchique. En cause, l’annexion de la Belgique et l’occupation de la rive gauche du Rhin qui menace l’équilibre des puissances. Malgré les différentes tentatives de paix et les gestes conciliants, Napoléon ne parvient pas à établir une paix durable, quand bien même est-il devenu empereur des Français. Victorieuse, l’Armée française permet une extension de la sphère d’influence française en Europe que seule la désastreuse campagne de Russie (1812) parviendra à détruire.

L’Empire est un régime de consensus en cela qu’il repose sur une rhétorique et des idéaux républicains tout en s’organisant de façon monarchique. Napoléon, royaliste contrarié par l’échec des Bourbons, s’inspire de l’Antiquité romaine pour tenter d’imposer un régime qu’il pense stable et légitime car émanant du consentement populaire (via consultations référendaires). En réalité, c’est un pouvoir qui ne peut se passer de sa présence, en témoigne l’évincement quasi-immédiat de son fils Napoléon II au cours de ses deux abdications. Cependant, ces seize années à la tête de la France et de ses armées vont graver un mythe napoléonien quasi-mythologique avec son panthéon (Napoléon, Davout, Lannes, Murat…), ses faits d’armes (Marengo, Austerlitz, Iéna, Friedland, Wagram…) et ses intrigues (Fouché, Talleyrand, la famille Bonaparte…). Hymne au mérite personnel et au génie, la légende napoléonienne va, à l’instar de la Révolution, profondément construire la France contemporaine.

 
Le Soleil d’Austerlitz, zénith de la France impériale (1805)

Le Soleil d’Austerlitz, zénith de la France impériale (1805)

 

D’un Empire à l’autre

Rétabli sur le trône de France par les puissances européennes, le frère de Louis XVI, Louis XVIII, restaure la monarchie traditionnelle tout validant précautionneusement les acquis de la Révolution. Son successeur et frère, Charles X, n’aura pas la même prudence en opérant, encouragé par une noblesse nostalgique, un retour à l’Ancien Régime. Paris se soulève à nouveau et le pouvoir chancelle. In extremis, l’élite française bourgeoise et nobiliaire place une branche cousine des Bourbons sur le trône en la personne de Louis-Philippe d’Orléans.

La « monarchie de Juillet » (car fondée lors de la Révolution de juillet 1830) installe le modèle royal britannique en France via l’établissement du parlementarisme. Pendant dix-huit ans, c’est le libéralisme qui gouverne, jusqu’à l’excès. Ainsi, alors que le pays est traversé par une triple crise économique (krach financier), alimentaire (famine) et sanitaire (épidémie de choléra), le régime meurt comme il est né, par l’insurrection révolutionnaire parisienne.

La Troisième Révolution française proclame une Deuxième République d’inspiration américaine. Cependant, des tensions existent pour déterminer l’orientation économique de ce nouveau régime : libéral ou social ? Les émeutes ouvrières de l’été 1848 vont régler la question en réaffirmant les fondements libéraux et conservateurs de cette république bourgeoise tout en discréditant les responsables de la répression sanglante. À peine né, le pouvoir tombe entre les mains des royalistes avec l’élection au suffrage universel masculin du prince Louis-Napoléon Bonaparte comme premier président de la République d’une part et d’une Assemblée nationale dominée par les monarchistes d’autre part. Eux-mêmes en conflit en raison d’une trop grande séparation des pouvoirs législatifs et exécutifs, la situation dégénère en coup d’État que décide le chef du pays.

Après la monarchie traditionnelle, voilà la restauration de l’Empire napoléonien par le neveu de l’Empereur qui prend le nom de « Napoléon III ». Sous son règne, le pays se développe, prospère et se modernise à grand pas. Les structures bancaires et sociales modernes naissent tandis que le pouvoir, d’abord autoritaire, se tourne vers une monarchie semi-parlementaire très proche, dans l’idée générale, de la Cinquième République originelle. Mais après presque deux décennies de prospérité, le rêve impérial s’arrête brutalement avec l’agression allemande menée par une Prusse en quête d’unification germanique.

 
Sous le Second Empire, la France redevient une nation fière et respectée (ici, réception de l’ambassadeur de Siam par le couple impérial, 1861)

Sous le Second Empire, la France redevient une nation fière et respectée (ici, réception de l’ambassadeur de Siam par le couple impérial, 1861)

 

Et la France devint républicaine

La chute de Napoléon III et de son Empire profite une nouvelle fois aux bourgeois parisiens qui proclament la Troisième République en pleine guerre contre l’Allemagne coalisée. Malgré une résistance notable, le pays demande la paix. Pour avoir continué la lutte, la France se voit amputé de l’Alsace-Moselle, certes de culture germanique, mais française depuis des siècles. Le traumatisme de la défaite entraîne une profonde remise en question que les troubles politiques n’aident pas. Finalement, le camp républicain, profitant de la division des monarchistes, l’emporte et s’empare de tous les corps d’État. La République, libérale et conservatrice, va réussir à s’imposer dans l’esprit des Français. C’est le temps de la Belle-Époque : la France continue sa modernisation commencée sous l’Empire tandis que le pays se tourne vers l’outre-Mer et la revanche envers l’Allemagne.

Pour autant, les crises politiques continuent de secouer un régime parlementaire instable comme la contestation boulangiste qui milite pour un pouvoir exécutif renforcé ou l’affaire Dreyfus. Sur le plan extérieur, la France multiplie les alliances défensives pour se prémunir d’un retour germanique. Enterrant une lutte millénaire, elle fait du Royaume-Uni un partenaire et de la Russie une puissante menace orientale. Tous les éléments sont installés pour que la prochaine guerre européenne soit d’importance mondiale.

 
Autre temps, autres mœurs : séduction sous la France de la Belle Époque (v. 1880)

Autre temps, autres mœurs : séduction sous la France de la Belle Époque (v. 1880)