Histoire des religions (3/3)
L’ère des guerres de religions
L’expansionnisme musulman et la cohabitation de différentes cultures considérant l’autre comme hérétique vont rapidement conduire à un choc civilisationnel dans le bassin méditerranéen. Ainsi, plus dans un but politique que proprement religieux (à savoir l’unité de l’Europe sous l’autorité décroissante du Pape), les royaumes européens vont se lancer dans les Croisades à destination du Proche-Orient. Là-bas, ils y fonderont d’éphémères colonies et rapporteront un exotisme culinaire comme administratif encore aujourd’hui présent en Occident (tribunaux, hôpitaux…). Dans le même temps, le christianisme se scinde en deux mouvements se revendiquant chacun d’un héritage de l’ancienne Rome : le catholicisme romain et l’orthodoxie byzantine. Ce sont d’ailleurs ces divisions au sein du monde chrétien qui vont permettre la victoire finale des Musulmans sur la Palestine, puis la chute de l’Empire romain d’Orient avec la prise de Constantinople. Enfin, il convient de rappeler que les Croisades concernent également l’entreprise de reconquête (Reconquista) de l’Espagne par les différents royaumes hispaniques. Cette dernière sera cependant bien plus victorieuse.
D’autres conflits surgirent autour du fait religieux mais à l’intérieur même des frontières nationales. Ainsi, l’Europe sera ravagée par de nombreuses guerres civiles opposant protestants et catholiques entre le XVIème et le XVIIIème siècle. L’équilibre des puissances fut complètement rebattu et de nouvelles alliances de revers virent le jour.
La mondialisation des religions et le défi scientifique
La découverte et la colonisation du Nouveau-Monde par les puissances européennes vont permettre au christianisme un nouvel essor. Les missionnaires affluent dans ces contrées peuplées de « sauvages » et autres « barbares » en mal de véritable foi. Pourtant, outre les Amérindiens animistes qui peuplaient le nord des Amériques, ce nouveau continent semble également abriter une riche histoire religieuse en témoignent les civilisations mayas, aztèques ou encore incas. Par bien des aspects ces trois grands peuples affichaient une mythologie proche de celles développées précédemment en Égypte, en Grèce, ou en Mésopotamie. Ces religions précolombiennes avaient développé leurs propres panthéons, rites, temples et conceptions de la vie après la mort. Toutes furent anéanties par la conversion forcée au christianisme et la lutte contre le paganisme, notamment de la part des colons et explorateurs espagnols.
La colonisation achevée, la religion de Jésus Christ était la plus répandue au monde alors que les Lumières et le progrès technique venaient mettre à mal la foi en Dieu. Partout en Europe, le déisme concurrençait les cultes codifiés. Les premiers athées faisaient également leur apparition, tentant de déconstruire les mythes et légendes bibliques voire l’existence même du divin. En France, avec la Révolution, de plus en plus de non-croyants et agnostiques apparaissaient jusqu’à constituer la majorité des citoyens au XXIème siècle.
D’autre part, le progrès technique, rapide et toujours plus universelles (évolution, gravitation, relativité générale, atome…) ne cesse de fragiliser les textes cosmogoniques et religieux qui, auparavant, élucidaient les mystères restés sans réponses. Les conflits de masses et industrialisés du XXème siècle amènent également, principalement en Occident, à une crise identitaire et religieuse majeure qui conduira à un délaissement de plus en plus grand.
Pour autant, la religion trouve un nouveau rôle dans la modernité en cristallisant les identités nationales ou ethniques. Ainsi, après la Seconde Guerre mondiale, les Juifs s’appuieront sur leur culte pour accompagner la construction et le développement de leur État hébreux en Palestine. De même, de nombreux pays et peuples arabes vont faire de l’islam un outil politique et nationaliste, notamment tourné contre l’Occident et son impérialisme culturel, militaire et économique ; d’Al-Qaïda à Daesh. Enfin, en Europe, le fait migratoire, perçu par beaucoup comme une invasion, contribue à un retour vers la religion chrétienne, considérée comme le ciment des identités nationales sur le Vieux-Continent.
Conclusion
De tous temps, la religion a accompagné l’Homme et le développement de ses civilisations. Fasciné par la nature qui l’environnait, il accoucha des premiers cultes et rites avant de donner naissance aux premières religions organisées. Celles-ci, dont le berceau se trouve principalement en Égypte et en Mésopotamie, seront étroitement liées au pouvoir politique sans toutefois s’y confondre. De cette adoration des dieux naquirent les premiers cultes monothéistes n’admettant l’existence que d’une seule et unique divinité. Symbole d’unité nationale pour les Juifs, outils de démocratisation du pouvoir et de l’autorité dans un monde en pleine déliquescence pour les Chrétiens, et arme de conquête et de pacification pour les Musulmans, la vénération du dieu unique a conduit à de nombreux conflits internationaux et civils. Avec les Lumières et le progrès technique, les religions connaissent un net recul au sein de populations de plus en plus éduquées, désabusées ou plus simplement sceptiques. Mais aujourd’hui, les cultes connaissent un nouvel essor, renforcés par des populations en manques de repères identitaires. La mondialisation et la négation des frontières et identités nationales conduisent à un repli religieux important de la part de populations hétéroclites. Ce retour à la spiritualité est-il synonyme de nouvelles guerres de religions ou annonce-t-il l’avènement d’une nouvelle ère culturelle ? Seul l’avenir nous le dira…
Sources :
Traité d’histoire des religions, Mircea Eliade (1949)
Mythes et Épopée I. II. & III., Georges Dumézil (1995)
The Bible Unearthed, Israël Finkelstein & Neil Asher Silberman (2001)
Curieuses histoires de la pensée. Quand l’homme inventait des religions, Jean Baudet (2011)
Les Religions. Des origines au IIIe millénaire, Collectif (2017)