Comment meurent les démocraties ? (3/3)

 
Jacques-Louis_David_-_The_Coronation_of_Napoleon_(1805-1807)_Cropped.jpg
 

La nécessaire démystification de la démocratie

Pour tout objet, la mystification s’accompagne d’une dénaturation sémantique. La démocratie ne fait pas exception – à l’instar de la République (française) utilisée à outrance par la classe politique comme pour remplacer le mot France. En l’espace de quelques décennies, la démocratie est devenue un fourre-tout érigé en rempart idéologique contre toute forme d’autorité dans une société de plus en plus intolérante envers les structures hiérarchiques.

Mais au-delà des mythes et des fantasmes, la démocratie véritable n’est pas exempte de défauts, portant parfois (souvent) en elle les germes de la tyrannie. Face aux crises majeures, Athènes fut emportée par les dictatures de Thémistocle et Périclès car incapable d’agir efficacement autrement. Devant les guerres civiles à répétition, Rome n’eut d’autre choix que de généraliser l’exceptionnelle magistrature dictatoriale, donnant naissance à la dignité impériale. De même, la monarchie élective des premiers temps de l’histoire de France ne survécu pas longtemps aux avantages d’une succession dynastique imposée par les Capétiens. Bonaparte succéda à un Directoire faible, corrompu et discrédité qui ne se maintenait que par des coups d’État à répétition. Enfin, la Troisième République fut balayée par l’invasion allemande du fait de son instabilité parlementaire paralysante.

C’est à se demander s’il n’exista jamais de démocraties « fortes » ! De tous temps, c’est la faiblesse des démocraties qui les emporta – les populations préférant troquer la liberté pour l’ordre, la stabilité et la paix. Ces mêmes populations qui aspirent plus tard à la démocratie lorsque l’ordre nouveau dégénère en tyrannie…

Conclusion

Les démocraties meurent et donnent naissance à des dictatures. Le plus souvent, c’est la défaillance même du système démocratique – ses travers exacerbés – qui provoquent un dégoût et un désintérêt de la population, principale victime de la déliquescence étatique. Par voie de conséquence, la dictature salvatrice dégénère le plus souvent en tyrannie contre laquelle ces mêmes peuples aspirent à la liberté et la démocratie. En somme, il semble que la mort des démocraties ne soit que le point de départ d’un cercle vicieux ou vertueux menant finalement à la renaissance d’une adhésion populaire ; en témoignent les vicissitudes du modèle républicain en France depuis la Révolution – entre amour et haine, dégoût et adoration. Dès lors, la force d’une démocratie n’est pas tant l’étendue de son autorité mais plutôt la mesure de son adhésion – décroissante avec le temps et l’exacerbation des travers institutionnels.