La diplomatie de l’Union européenne, un bouclier ou un paillasson ?

 
Sylvie Goulard, candidate d’Emmanuel Macron, rejetée à la Comission européenne

Sylvie Goulard, candidate d’Emmanuel Macron, rejetée à la Comission européenne

 

Bien que la liste de la majorité présidentielle ne soit arrivé que deuxième derrière le Rassemblement national, le président Macron pouvait s’estimer en bonne position pour dicter l’agenda des institutions européennes. En effet, les planètes étaient alignées pour le «maitre des horloges». D’un côté, son parti et ses alliés libéraux centristes ailleurs en Europe ont fait rentrer suffisamment de députés dans l’hémicycle de Bruxelles pour briser la majorité précédente du PPE (conservateurs) et du PSE (sociaux-démocrates, socialistes).  De l’autre côté, l’Espagne était affaiblie par les soubresauts de la crise catalane, l’Italie avait perdu son gouvernement national-populiste, le Royaume-Uni était déjà en retrait avec le Brexit et la chancelière Merkel gérait difficilement sa grande coalition. A l’inverse, avec les institutions de la Ve République, la France apparaissait étonnement stable.

Les conséquences s’en sont vite fait sentir. Le candidat du PPE à la présidence de la Commission, Manfred Weber, qui déplaisait au président pour son manque d’expérience dans un exécutif, a été éjecté. C’est sur proposition française que les chefs d’Etat et de gouvernements sont tombés d’accord sur le nom d’Ursula von der Leyen. Ministre allemande de la Défense, elle présidera donc la Commission. Deux autres succès pour le président Macron lors de l’attribution des «topjobs» européens : la nomination de Christine Lagarde à la tête de la Banque Centrale Européenne et celle de son allié belge, le premier ministre Charles Michel, comme président du Conseil européen. Enfin, il a réussi à obtenir un gigantesque portefeuille de commissaire pour son futur candidat : le marché intérieur, le numérique, la culture, l’industrie, la défense et l’espace.

Plusieurs noms ont circulé pour le futur titulaire du poste. Mais, le choix présidentiel s’est finalement arrêté sur Sylvie Goulard.

Sylvie Goulard, même si on peut ne pas être d’accord avec ses idées politiques, avait un profil rêvé. Elle était un ancien et proche soutien d’Emmanuel Macron, qui aurait ainsi son œil à l’intérieur de la Commission. Elle avait été (quoique brièvement) ministre des Armées mais surtout député européenne depuis 2009. A une maîtrise reconnue des dossiers européens, la Française ajoutait une relation de confiance avec la présidente de la Commission, auparavant son homologue et un carnet d’adresses étendu.

Mais, sa candidature pouvait être plombée par deux boulets. Le premier était une affaire concernant l’emploi fictif d’assistants parlementaires européens de son parti, le Modem. Cette affaire l’avait conduite à quitter l’hôtel de Brienne auparavant. Le second consistait en un conflit d’intérêt à cause d’un travail de consultante pour un think-tank hautement rémunéré.

Ces boulets n’ont pas seulement ralenti sa candidature après deux séances d’auditions au Parlement européen mais ils l’ont enterré. En effet, sa candidature fut rejetée avec éclat par les eurodéputés. Les eurodéputés français de l’opposition ont manifesté une certaine joie sauvage à l’idée d’avoir infligé un revers parlementaire au président Macron.

Que retenir de cette affaire ? En dépit d’une compétence unanimement reconnue, un candidat doit-il être rejeté pour des affaires judiciaires ou des soupçons ? Devrait-on seulement lui permettre de se présenter ?

Ou bien, doit-on comprendre le rejet de la candidature Goulard comme une fronde de parlementaires européens contre un président français perçu comme arrogant ? C’est qu’ici le Parlement européen a prouvé qu’il était plus qu’une chambre d’enregistrement de décisions prises ailleurs.

Les institutions européennes ont un fonctionnement complexe, suffisamment complexe pour entremêler démocratie directe, indirecte, intérêt des Etats de sorte que personne n’y trouve son compte. Une rénovation du fonctionnement de l’Union européenne devra un jour être mise en œuvre, ne fusse que pour inciter les Etats à en demeurer membre