La Guerre de 1870 : Les dessous d’un désastre

 
La charge du 9ème Cuirassiers à Morsbrönn, lors de la bataille de Reichschoffen, en 1870 - Edouard Detaille, 1873-1874

La charge du 9ème Cuirassiers à Morsbrönn, lors de la bataille de Reichschoffen, en 1870 - Edouard Detaille, 1873-1874

 

Article écrit par Bastien P.

« Lorsque l’orgueil va devant, honte et dommage le suivent ». Cet avertissement énoncé par Louis XI aurait pu permettre à Louis-Napoléon Bonaparte de garder son trône s’il l’avait suivi. Le 19 juillet 1870, Napoléon III déclare la Guerre à la Prusse. Pourquoi la France, alors que rien ne l’y oblige, prend-elle la décision d’attaquer la première ?

 

Une armée qui a perdu l’habitude des conflits de haute intensité

Durant la première moitié du XIXe siècle, l’armée française a été déployée à de nombreuses reprises sur différents théâtres. Tout d’abord de 1830 à 1848 durant la campagne d’Algérie où, grâce à l’usage immodéré des « razzias », réussit à vaincre l’émir Abdelkader ; ensuite, contre les Russes, durant la Guerre de Crimée avec notamment le siège de Sébastopol en 1855 ; puis, le soutien aux indépendantistes italiens et la victoire de Solférino contre l’Empire d’Autriche en 1856.  Et enfin, l’expédition au Mexique de 1861 à 1867 qui fut un échec. Toutes ces campagnes ont aguerries les hommes. Cependant, elles ne les préparent en aucun cas à un conflit de haute intensité l’opposant à une nation européenne possédant un égal niveau technologique.

Dans le même temps, la Prusse se prépare, elle, à ce type de conflit. Depuis 1810, la Kriegsakademie, créée pour contrer la suprématie napoléonienne, étudie avec attention les tactiques et les armements français. La politique prussienne structure l’armée dans un but précis : unifier les Etats allemands. Pour atteindre cet objectif, une nouvelle doctrine est élaborée. Celle-ci est axée sur la puissance de feu, la concentration des forces et une planification rigoureuse. Contrairement aux Français, la Prusse va avoir l’occasion de mettre sa doctrine à l’épreuve. En effet, avant de pouvoir s’attaquer aux Français, les Prussiens doivent restreindre l’influence autrichienne sur les Etats allemands. Le 3 juillet 1866, l’Empire d’Autriche est défait à Sadowa. La conclusion des généraux prussiens est claire, leur doctrine est fin prête, ils ne feront qu’une bouchée des orgueilleux Français.

 

Le jeu diplomatique pousse la France en guerre

Nous devons comprendre, que jusqu’en juillet 1870, personne ne croit à la guerre. La France est un pays respecté et son armée reconnue de tous. Les dernières campagnes militaires menées par Napoléon III n’ont fait que renforcer cette aura.

Cependant, le chancelier prussien Otto von Bismarck sait que la réunification des États allemands devra passer par la guerre, et la France est la victime idéale. En effet, la défaite de Iéna de 1806 est encore gravée dans les esprits. Il va déployer tout son savoir-faire stratégique et transformer une simple querelle diplomatique pour la succession au trône d’Espagne, en un camouflet inacceptable pour la France. Pour cela, il fait en sorte qu’un prince allemand,  Léopold de Hohenzollern-Sigmaringen, se propose comme Roi d’Espagne. Louis-Napoléon Bonaparte ne peut l’accepter, il a en tête l’encerclement de la France par les Habsbourg sous Charles Quint. Un diplomate français est alors envoyé à la cour de Prusse demander à Guillaume Ier de jurer, de ne plus jamais revendiquer le trône d’Espagne pour le compte d’un membre de sa famille. Celui-ci refuse poliment, cependant, Bismarck voyant l’opportunité, en informe la presse, qui présente alors ce refus comme une humiliation totale pour la diplomatie française.

L’opinion française est en fureur, le corps politique entier surenchérit les uns sur les autres pour ne pas paraitre lâche et le 19 juillet 1870, la guerre est déclarée. Du côté français, on estime que la Prusse, vaincue dans le passé sera défaite en quelques semaines. En Europe, l’acte de guerre est vu comme une agression. Les états allemands, qui jusqu’alors restaient dans une neutralité prudente se rallient à la Prusse. L’objectif de Bismarck est rempli, l’Allemagne fait front, uni face à l’envahisseur français.

 

La débâcle française

En juillet 1870, à l’aube de la guerre, les forces en présence sont ridiculement défavorables à l’Empereur. Les historiens estiment, qu’après avoir rassemblé les différentes troupes de métropole et des colonies, les Français alignent environ 280 000 hommes contre 500 000 Allemands. Ces armées sont néanmoins largement inférieures à celles que l’on retrouvera durant la première mondiale. Il n’est ainsi pas possible de créer un front de défense continu et l’objectif des généraux revient plutôt à essayer de créer un surnombre en un point donné.

Les généraux français devant l’inefficacité de leur logistique et le chaos dans lequel se retrouvent tous les soldats dépêchés en hâte sans réel commandement et organisation, renoncent à leur projet d’offensive et concentrent leurs forces à la frontière.

Les combats tournent immédiatement à l’avantage des Prussiens. Individuellement, le soldat français mieux armé et plus aguerri, n’a rien à envier à ses homologues prussiens. Cependant, collectivement, l’usage intensif de l’artillerie et la coordination des forces allemandes leur donnent un immense avantage.

L’armée française est bousculée, défaite à Woerth le 6 août, l’armée d’Alsace recule et est rattrapée au niveau de la Moselle. Ses 180 000 hommes finissent par se faire encercler dans Metz. Le général Mac Mahon rejoint par l’Empereur, rassemble une nouvelle armée pour délivrer Metz, mais finit par se faire encercler à son tour. Le 2 septembre 1870, à Sedan, Napoléon III capitule.

La IIIe République est proclamée le 4 septembre. Cependant, malgré l’enthousiasme de ses dirigeants, avec en tête Gambetta, la situation militaire n’évolue que très peu. Le front finit par se stabiliser en différents endroits. Mais, la capitulation de Bazaine à Metz et la chute de Paris, force la France à demander la paix. L’armistice est déclaré le 26 janvier 1971.

Le traité de Francfort qui s’ensuit, officialise la victoire allemande. La France cède l’Alsace et la Moselle et s’engage à payer des indemnités de guerre au nouvel empire allemand (5 milliards de Francs or). Durant, ce conflit, 140 000 français perdent la vie contre seulement 50 000 allemands.

L’humiliation est terrible. Elle apporte dans les cœurs des Français un désir de vengeance qui sera l’une des causes principales de la première Guerre-Mondiale.

 

Sources :

https://www.revueconflits.com/michael-hamann-guerre-1870-legionnaire/

https://www.revueconflits.com/guerre-1870-jean-baptiste-blandenet/