Qu’en est-il du GPS européen ?

 
Galileo satellite with search and rescue antenna - ESA

Galileo satellite with search and rescue antenna - ESA

 

Il y a presque vingt ans, le développement et la mise en orbite d’une constellation de satellites dédiés au positionnement étaient lancés par l’agence spatiale européenne (ESA). L’objectif de ce projet : doter l’Europe d’un système de géolocalisation performant et indépendant des systèmes russe (GLONASS), américain (GPS) et chinois (Beidou, encore en développement). Après de nombreux essais, problèmes financiers et délais, le projet Galileo est aujourd’hui en passe d’aboutir et de proposer une alternative crédible aux dispositifs existant.  

Galileo, c’est quoi ? 

Tout d’abord, brossons un rapide portrait du système Galileo. Il consiste en une constellation de 30 satellites, 24 satellites opérationnels et 6 satellites de rechange, répartis en orbite terrestre moyenne (1) sur trois plans orbitaux(2) différents. Cette disposition permet une couverture optimale de la Terre à n’importe quel moment du jour terrestre. Les satellites sont équipés de plusieurs dispositifs d’émission afin d’émettre les différents signaux utilisés par le système Galileo

Le système offre plusieurs types de services selon les utilisateurs et le paiement d’une redevance à l’opérateur Galileo. Un service gratuit ouvert à tous les utilisateurs assure une précision horizontale(3) de 4 à 5 mètres selon la qualité du signal reçu. Un service payant de haute précision permet d’obtenir une précision inférieure à un mètre et d’utiliser des fréquences de positionnement cryptées. Galileo propose également une application destinée aux missions de service public, particulièrement précis, utilisant une connexion cryptée ainsi que deux signaux indépendants pour prévenir un brouillage du signal. Enfin, Galileo participe au système mondial Cospas-Sarsat qui est un système mondial d’alerte et de localisation des sinistres. 

Quel est l’intérêt d’un système de géolocalisation ? 

Les systèmes de géolocalisation sont le plus souvent utilisés pour des applications de navigation. Que ce soit sur la route, en mer ou dans les airs, tous les moyens de transport modernes y font appel. Par ailleurs, avec le développement des smartphones et des applications afférentes, la possession d’un système de géolocalisation performant va constituer une plus-value importante. 

Dans le domaine militaire, les systèmes d’exploitation sont également très largement exploités. Que ce soit pour des frappes de missiles très précises (évitant ainsi les dégâts civils collatéraux) ou du renseignement militaire, la guerre moderne est très dépendante de ces dispositifs. La possession par un état d’un système de géolocalisation permet ainsi d’assurer son indépendance vis-à-vis des autres puissances spatiales. 

Qu’apporte Galileo ? 

Galileo offre une précision de localisation équivalente à ses concurrents russes et américains et celle-ci est moins dépendante du nombre de satellites en vue. En effet, même avec le nombre minimum de satellites Galileo conserve une précision horizontale inférieure à 10 mètres là où le GPS a une précision de l’ordre de 20 mètres dans cette situation. Par ailleurs, contrairement à ses homologues russes et américains, Galileo est sous contrôle civil ce qui permet des retombées économiques plus importantes et une utilisation plus sûre pour les particuliers. Enfin, Galileo apporte une bonne couverture jusqu’au 75e parallèle nord, situé au-dessus de l’extrémité des états scandinaves. Le système est donc utilisable dans de bonnes conditions sur la quasi-totalité de la surface habitée du globe. 

Galileo permet aux pays européens de s’affranchir de la tutelle américaine et de les protéger d’une interruption du système GPS. S’il n’a pas vocation à remplacer les satellites militaires des pays européens, le système Galileo permet également aux pays européens n’ayant pas de satellites militaires propres de s’affranchir de leur dépendance au système américain dans ce domaine crucial. De plus, grâce à un accord d’interopérabilité avec le système GPS, les récepteurs GPS et Galileo sont mutuellement compatibles ce qui permet de profiter du système européen sans devoir changer les appareils actuels. 

En termes de politique, Galileo est un projet phare de la Commission européenne. Le projet montre en effet que les pays européens unis peuvent mettre au point un système de géolocalisation complexe et compétitif. Il a par ailleurs mené à la création d’une agence européenne dédiée à la gestion du système sous la tutelle de l’Union européenne (UE), le GSA. Le projet ayant été financé en grande partie par l’UE, elle en est le propriétaire. Cela peut s’avérer problématique en cas de disparition de l’UE telle qu’on la connaît aujourd’hui et générer des conflits pour la mainmise sur le système. Il ne faut pas non plus oublier les nombreuses difficultés (ralentissements, financement) rencontrées par le projet au cours de son développement à cause de rivalités entre les états de l’Union européenne. 

Le système Galileo réaffirme la position privilégiée qu’occupe la France en Europe pour tout ce qui touche aux projets spatiaux. En effet, les lancers sont réalisés depuis la base de Kourou en Guyane et une partie des satellites est mise en orbite grâce aux lanceurs Ariane pour lesquels la contribution française est majoritaire. En plus d’affirmer son statut de puissance spatiale, ce projet permet à la France de continuer à développer de nouvelles technologies en lien avec ce domaine de recherche Ainsi, elle ne se laisse pas distancer par ses principaux concurrents que sont la Russie, la Chine, les États-Unis, mais aussi par les nouveaux venus comme l’Inde ou Israël. 

Quelles perspectives pour Galileo ? 

Pour le moment, les 30 satellites de la constellation n’ont pas tous été mis sur orbite, mais les 24 satellites nécessaires à une géolocalisation optimale sont d’ores et déjà opérationnels. Les prochains lancers n’auront pas lieu avant 2020, ainsi le système est aujourd’hui plus sensible à des défaillances qui pourraient apparaître que lors de son fonctionnement routinier.  

Galileo doit donc faire ses preuves, ce qui semble pour le moment mal engagé puisqu’en juillet dernier, un dysfonctionnement a paralysé l’intégralité du système pendant 6 jours. Cet évènement a contraint le GSA à relancer entièrement le système et pose la question de la fiabilité de Galileo.  

Malgré ces incidents consécutifs à sa mise en route, le GPS européen a tout de même de beaux jours devant lui et devrait être amélioré régulièrement, avec notamment un service militaire d’ici 2023. Espérons que la France saura tirer le meilleur de ce projet européen et qu’elle en profitera pour consolider sa souveraineté. 

(1) L’orbite terrestre moyenne est une zone orbitale intermédiaire comprise entre 2000 et 35786 kilomètres d’altitude. 

(2) Le plan orbital est le plan dans lequel le satellite évolue. Ce plan contient la trajectoire du satellite ainsi que le centre de l’astre autour duquel il est en orbite. 

(3) La précision horizontale correspond à l’incertitude de positionnement du système par rapport aux coordonnées d’un planisphère. Elle ne prend donc pas en compte l’incertitude sur l’altitude du système. 

Sources :

What is Galileo ? ; site internet de l’ESA, mis à jour le 02/11/2017 https://m.esa.int/Our_Activities/Navigation/Galileo/What_is_Galileo 

Galileo Services ; site internet du GSA, mis à jour le 25/09/2018 https://www.gsa.europa.eu/galileo/services 

Galileo : la mystérieuse panne du GPS européen ; BFM business, 15/07/2019 https://bfmbusiness.bfmtv.com/entreprise/galileo-la-mysterieuse-panne-du-gps-  europeen-1731259.html 

Les puissances de l’espace ; Le journal CNRS, 01/08/2017 https://lejournal.cnrs.fr/articles/les-puissances-de-lespace 

Galileo ; site internet du CNES, 17/11/2016  https://galileo-mission.cnes.fr/fr